Encyclopédie de religions africaines – CIRCONCISION (Ablation du prépuce)
Avant Propos : Chers lecteurs et lectrices, avant de vous lancer dans la lecture de ce contenu nous vous conseillons de lire d’abord notre article d’introduction, vous le trouverez en cliquant sur le lien en surbrillance suivant : Encyclopédie de religions africaines – Introduction : Notions et Concepts. Ce dernier vous permettra de mieux appréhender le sens que nous voulons donner à l’ensemble de cette rubrique.
Différentes formes d’opérations chirurgicales et rituelles, connues sous le nom de circoncision, sont réalisées sur les organes sexuels humains à travers le monde. En Afrique, il s’agit d’une pratique ancienne. Beaucoup de gens croient à tort qu’elle a des origines israélites ou islamiques, alors qu’en réalité, la circoncision précède les naissances de Jésus-Christ et de Mohammed. C’est une pratique bien plus ancienne que le judaïsme et l’islam, qui a été transmise aux Israélites par les anciens Égyptiens. Cet article explore cette histoire et la pratique en Afrique.
1. Contexte historique
Les plus anciens témoignages documentaires concernant la circoncision masculine proviennent de l’Égypte ancienne. De nombreuses preuves de ce rite de circoncision se retrouvent dans les reliefs et peintures des temples égyptiens. Des œuvres funéraires datant de la 6e dynastie (2345–2181 av. J.-C.) illustrent des hommes avec des pénis circoncis. De plus, un relief de cette époque représente le rite pratiqué sur un homme adulte debout. Les anciens Égyptiens sacrifiaient le prépuce au dieu Min, associé à la fertilité et à la sexualité, en le brûlant. Min était représenté sous la forme d’un homme avec un pénis en érection.
Il est important de souligner que, bien que la circoncision ait des origines égyptiennes anciennes et qu’elle ait été courante dans ce puissant royaume africain, elle n’était pas pratiquée systématiquement sur tous les hommes ni exigée de tous. En effet, l’analyse des hiéroglyphes égyptiens anciens pour le mot pénis montre soit un organe circoncis, soit un organe en érection. De plus, l’examen des momies égyptiennes anciennes des pharaons a révélé que certains hommes étaient circoncis tandis que d’autres avaient un prépuce. L’outil utilisé pour réaliser la circoncision était le silex, une pierre dure et grise qui produit des étincelles ou de petites flammes lorsqu’elle est frappée avec de l’acier.
Dans l’Ancienne Israël, la circoncision était réalisée lors d’une cérémonie spéciale appelée berith ou briss, le huitième jour après la naissance. Cette pratique concernait les garçons nés de parents natifs, de serviteurs et d’étrangers. Au départ, c’était le père qui effectuait la circoncision. Les Juifs utilisaient un couteau pour cette procédure, mais par la suite, des spécialistes appelés mohels (circonciseurs) ont été chargés de réaliser le berith.
Dans la tradition islamique, le khitan (circoncision masculine), également désigné de manière euphémique par tahara (purification), devait être pratiqué sur un garçon seulement lorsqu’il atteignait l’âge de 13 ans. Les groupes ethniques bédouins arabes procédaient à la circoncision des garçons la veille de leur mariage. Cette pratique était considérée comme un test d’endurance, de bravoure et d’honneur, car le futur mari devait chanter pendant l’opération, prouvant ainsi à la foule qu’il était plus fort que la douleur. Cependant, il devient de plus en plus courant que les garçons musulmans soient circoncis plusieurs années plus tôt, parfois dès le septième jour après leur naissance. Les Sunnetci musulmans (circonciseurs formés et expérimentés) utilisent également des couteaux ou des lames de rasoir pour réaliser cette intervention.
2. Pratique en Afrique
Dans les pays africains, l’âge auquel la circoncision est pratiquée varie considérablement selon les groupes ethniques et les familles, et dépend des affiliations religieuses ainsi que, dans certains cas, des préférences personnelles. Elle peut être réalisée à n’importe quel moment du développement humain, dès la naissance ou jusqu’à l’âge adulte. Les outils utilisés pour effectuer ce rite sont également divers et incluent des couteaux, des ciseaux, des lames de rasoir et d’autres instruments tranchants. Bien qu’aujourd’hui la circoncision soit principalement réalisée par des médecins ou des infirmiers, elle s’inscrit dans un large éventail de contextes culturels et diffère considérablement en termes de méthode, de justification, d’envergure, de signification et d’effets.
En effet, selon que l’opération chirurgicale rituelle est pratiquée sur des organes génitaux masculins ou féminins, le terme circoncision revêt des significations et des connotations différentes. Jusqu’à récemment, le terme circoncision, souvent désigné dans le jargon médical par Acucullophallia, Peritomy ou Posthetomy, était utilisé exclusivement pour désigner l’opération chirurgicale effectuée sur les organes génitaux masculins (circoncision masculine). Cette signification originale est encore présente dans plusieurs langues africaines. Par exemple, en fongbe, la circoncision se dit Adà gbigbó (Adà = pénis, gbigbó = coupe), en yoruba, elle est appelée Okó didà (Okó = pénis, didà = coupe), et en mina, on l’appelle Evo sosso (Evó = pénis, sóssó = coupe).
3. Circoncision féminine
À l’inverse, le terme excision a longtemps été utilisé pour désigner exclusivement les opérations chirurgicales homologues pratiquées sur les femmes (circoncision féminine, ou khafd en arabe). En effet, le mot français pour désigner une femme qui réalise une forme de circoncision féminine sur ses pairs est exciseuse. Cependant, ce que l’on appelle aujourd’hui la circoncision féminine a pris de nombreuses dimensions en termes de formes et de techniques, au point que le terme excision ne désigne plus qu’un des différents types de circoncision féminine. Selon la classification de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la circoncision féminine est désignée sous les termes de mutilation sexuelle féminine (MSF), mutilation génitale féminine (MGF) ou coupe génitale féminine (CGF). Il existe quatre types.
La clitoridectomie, également appelée Type 1 de la coupe génitale féminine (CGF), se définit comme l’ablation du capuchon clitoridien, avec ou sans retrait du clitoris. Le capuchon clitoridien correspond à la peau qui recouvre le pénis, laquelle est enlevée lors de la circoncision. L’excision, connue sous le nom de Type 2 de la CGF, consiste en l’ablation du clitoris ainsi que d’une partie ou de la totalité des petites lèvres. L’infibulation, ou Type 3 de la CGF, se caractérise par l’ablation d’une partie ou de la totalité des organes génitaux externes (clitoris, petites lèvres et grandes lèvres) et par la couture et/ou le rétrécissement de l’ouverture vaginale, laissant un petit orifice pour l’urine et les flux menstruels. Le Type 4 de la CGF, qui n’est pas classifié, englobe toutes les autres interventions réalisées sur les organes génitaux féminins, y compris…
- Piquer, percer, étirer ou inciser le clitoris et/ou les lèvres.
du clitoris et/ou des lèvres ; - Cautérisation par brûlure du clitoris et des tissus environnants
incision de la paroi vaginale ; grattage ou coupe du vagin et des tissus environnants ; - Incision de la paroi vaginale ; grattage ou coupe du vagin et des tissus environnants
incision de la paroi vaginale ; raclage ou incision du vagin et des tissus environnants ;
l’introduction de substances corrosives ou d’herbes
de substances corrosives ou d’herbes dans le vagin.
4. Justifications
Il existe plusieurs théories expliquant la nature et la justification du rite de la circoncision. L’une des plus répandues est qu’il s’agit d’un rite d’initiation. La circoncision était pratiquée avant le mariage ou à la puberté, constituant un passage obligé pour les adolescents. En d’autres termes, ce rituel était considéré comme une étape nécessaire avant le mariage. Parmi de nombreux groupes ethniques africains, en particulier les Maasaï du Kenya, il existe des périodes spécifiques durant lesquelles le rite de circoncision est effectué. Les garçons doivent prouver qu’ils sont prêts en accomplissant certaines tâches viriles, comme s’occuper du bétail, avant de pouvoir être circoncis. Lorsqu’ils estiment être prêts, ils s’adressent à des aînés juniors pour demander l’ouverture d’une nouvelle période de circoncision.
Une autre explication concerne l’hygiène physique. On pense que la circoncision est une procédure de santé nécessaire qui aide à prévenir l’attraction ou la transmission de maladies. Sur le plan médical, plusieurs affections, telles que le carcinome pénien, la posthite, le phimosis et la balanite, seraient spécifiques aux hommes non circoncis. De plus, le risque d’infection des voies urinaires serait considérablement plus élevé chez les hommes non circoncis. Il a également été rapporté que 9 hommes non circoncis sur 10 rencontrent des difficultés ou ressentent de la douleur lorsqu’ils essaient de tirer en arrière le prépuce lors d’une érection.
Il existe bien sûr une controverse concernant la validité médicale de la circoncision, au point que, dans des pays développés comme les États-Unis, certains hommes circoncis par le passé reprochent à leurs parents de les avoir soumis à cette procédure. En conséquence, ces hommes cherchent à restaurer leur prépuce en ayant recours à des interventions médicales appelées restauration du prépuce et remodelage du pénis.
Dans plusieurs cultures, la circoncision est un rite d’entrée dans la communauté de foi. Chez les Israélites, elle est devenue le symbole du peuple de l’Alliance. Quiconque était non circoncis était méprisé et ne pouvait pas participer aux espoirs de la nation ni prendre part au culte de Yahweh.
La circoncision peut également être un signe distinctif ethnique. Dans de nombreux groupes ethniques africains, elle est considérée comme un symbole de distinction, de bravoure et de virilité. Pour les Maasaï du Kenya, la circoncision détermine le rôle qu’un garçon jouera tout au long de sa vie, qu’il soit leader ou suiveur. Un garçon qui crie pendant la procédure est perçu comme un lâche et sera longtemps rejeté, tandis qu’un garçon courageux ayant mené une vie exemplaire devient le leader de son groupe d’âge. La préparation des cérémonies de circoncision chez les Maasaï nécessite des mois de travail, ce qui fait que la date exacte de l’événement est rarement connue à l’avance.
La circoncision masculine et féminine revêt une importance culturelle et religieuse dans les sociétés africaines. Par exemple, lorsque la demande pour une nouvelle période de circoncision est approuvée, les garçons maasaï entament une série de rituels, dont l’Alamal Lenkapaata, qui est la préparation à la circoncision et constitue la dernière étape avant l’initiation formelle. Avant d’être circoncis, les garçons maasaï doivent avoir un liabon, un leader capable de prédire l’avenir, qui les guide dans leurs choix. Ils se décorent avec de la peinture à base de craie et passent la nuit à l’extérieur. Les aînés chantent, célèbrent et dansent toute la nuit en l’honneur des garçons. Il est important de noter qu’une fois qu’une période de circoncision est terminée, elle ne peut pas être rouverte pendant de nombreuses années. Le rite de circoncision est pris très au sérieux dans la culture et la religion africaines.
5. Polémiques (Controverses)
Parmi les deux types de chirurgies génitales cérémonielles, la circoncision féminine est sans conteste la plus controversée, la plus débattue et la plus médiatisée. De nombreux articles, livres, études, documentaires et films traitent de ce sujet. Bien que certains défendent cette pratique en arguant qu’elle est purificatrice, d’autres proposent de réexaminer le rite afin d’améliorer les méthodes de réalisation. En revanche, la majorité des écrits, souvent rédigés par des personnes extérieures à cette pratique, s’opposent fermement à la circoncision féminine et appellent à son abolition, la qualifiant de torture horrifiante et d’injustice faite aux femmes.
Le film documentaire Warrior Marks : Mutilation Génitale Féminine et l’Obscurcissement Sexuel des Femmes, réalisé en collaboration par Alice Walker et la cinéaste indienne Pratibha Parmar entre 1992 et 1993, fait partie de la littérature consacrée à la circoncision féminine. Ces deux militantes ont rassemblé des témoignages, des photographies, des poèmes, des interviews et des avis médicaux suggérant que la circoncision féminine pourrait contribuer à la propagation du VIH/SIDA. Avant ce documentaire, qui est salué par certains et jugé provocateur par d’autres, Walker avait publié un autre livre, Possessing the Secret of Joy (1992), dans lequel elle encourageait les femmes à briser le silence et à résister à la mutilation génitale féminine. Ces dernières années, de nombreuses œuvres similaires à celles de Walker ont vu le jour.
Sources complémentaires : Folly, A.-L. (1994). Femmes aux yeux ouverts (film) [Women With Open Eyes]. Togo : Produit par Amanou Productions. Kassindja, F. (1999). Do They Hear You When You Cry? New York : Delta. Love, B. (1994). Encyclopedia of Unusual Sex Practices. New York : Barricade Books. Walker, A. (1992). Possessing the Secret of Joy (1ère éd.). New York : Harcourt Brace Jovanovich. Walker, A., & Parmar, P. (1996). Warrior Marks : Mutilation Génitale Féminine et l’Obscurcissement Sexuel des Femmes. New York : Harvest Books. Organisation mondiale de la santé. (1996). Mutilation Génitale Féminine : Rapport d’un Groupe de Travail Technique. Genève : Auteur.