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    L’histoire de Abraha

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    I. La trinité selon Abraha

    Entre les années 548 et 552, le souverain himyarite Abraha a parrainé trois gravures qui offrent un aperçu du christianisme pratiqué dans le sud de l’Arabie durant le VIe siècle. Ces inscriptions révèlent trois énoncés distincts : Par la force, le soutien et l’assistance de Rahmanan, le maître des cieux et de son Messie ; Par la force, l’assistance et la clémence de Rahmanan, de son Messie et de l’Esprit Saint; Par la force de Rahmanan et de son Messie  (à noter, la grande inscription d’Abraha à Marib, sculptée sur une colonne).

    Dans ces textes, la figure paternelle est systématiquement invoquée sous le nom unique de Rahmanan, une particularité sans précédent. Les deux autres figures de la Trinité sont également mentionnées, mais de manière inhabituelle. La seconde figure est appelée le Messie  plutôt que le Fils, ce qui suggère une vision de celle-ci comme un homme choisi par Dieu plutôt qu’une divinité incarnée ; cela reflète vraisemblablement une volonté d’attirer l’allégeance politique des Juifs, qui rejetaient la divinité du Christ. L’Esprit Saint, quant à lui, est absent dans deux des trois formules, indiquant que cette troisième figure de la Trinité n’était pas perçue comme une divinité distincte, mais plutôt comme une entité surnaturelle créée. Ces concepts introduits par Abraha peuvent être interprétés comme un compromis ou une fusion entre le judaïsme et le christianisme, et ils ont apparemment trouvé un écho favorable, influençant la doctrine de Muhammad concernant le Messie et l’Esprit Saint, quelques décennies plus tard.

    II. Abraha contre le Negus

    Aux alentours de l’année 532, le souverain chrétien installé par le négus sur le trône du royaume de Himyar est détrôné suite à un soulèvement mené par l’armée aksumite occupante, qui hisse au pouvoir un de ses leaders, le renommé Abraha, originaire d’Aksum. Durant environ quinze ans, Abraha fait face à divers obstacles, y compris des campagnes punitives lancées par le négus et des insurrections tribales. Néanmoins, il parvient finalement à faire reconnaître son autorité par les grandes puissances de la région, dont Byzance, Aksum et la Perse, à l’automne 547, et se lance immédiatement dans la réappropriation de l’Arabie désertique. Il y parvient en 552, en obtenant notamment l’allégeance de Yathrib  (l’actuelle Médine).

    Abraha déplace ensuite la capitale à Sanaa, située entre Zafar et Najran, où il commande la construction d’une magnifique église entre 559 et 560. C’est probablement à cette période qu’il procède à une réforme du calendrier, délaissant le calendrier lunaire avec ses mois intercalaires babyloniens (toujours en usage chez les Juifs aujourd’hui) au profit d’un calendrier solaire de type julien.

    La dernière référence datée concernant Abraha remonte à novembre 559. Aucun texte de l’époque ne fournit d’informations sur la fin de son règne. Les seuls éléments disponibles émanent de la tradition érudite arabo-musulmane, selon laquelle Abraha aurait trouvé la mort lors d’une campagne désastreuse visant à détruire la Kaaba de La Mecque, en raison de la concurrence que celle-ci représentait pour les pèlerinages à Sanaa. Cependant, ce récit est une reconstruction postérieure, où il est ardu de séparer les faits historiques des exagérations apologétiques. Un scénario plausible serait celui d’une catastrophe militaire causée par la peste, suivie de l’éclatement du royaume de Himyar. Le règne d’Abraha était essentiellement fondé sur son charisme personnel. Ses deux fils, qui lui succèdent tour à tour, ne parviennent pas à s’affirmer au pouvoir.

    Au milieu du VIe siècle, un noble juif yéménite, Sayf ibn Dhi-Yazan, cherchant à évincer les forces aksumites, sollicite l’aide de l’empire sassanide de Perse. En réponse, les Perses dépêchent des troupes qui s’établissent durablement dans la région. Vers 628, sous le règne de Muhammad et peu avant son décès en 632, le dernier dirigeant perse du Yémen se convertit à l’islam. Le Yémen devient alors une contrée marginale au sein d’un empire étendu, dont les capitales successives sont Médine, Damas et Bagdad.

    Le christianisme, autrefois répandu au Yémen, décline rapidement après l’invasion islamique, à l’exception de quelques bastions comme Najran et l’île de Suqutra. Au début du XIIIe siècle, Najran abrite encore une population composée d’un tiers de chrétiens et d’un tiers de juifs. Les dernières communautés chrétiennes de la région résident sur l’île de Suqutra, qui se convertit à l’islam suite à l’arrivée des Portugais dans l’océan Indien au XVIe siècle.

    Le judaïsme, quant à lui, continue de prospérer au Yémen, principalement dans les régions montagneuses. Bien qu’il se soit aligné sur les pratiques du judaïsme rabbinique, il conserve des traits distinctifs, dont un fervent espoir messianique qui se manifeste par de multiples révoltes. Les soulèvements connus ont eu lieu aux XIIe, XVe et XVIIe siècles, ainsi que dans les années 1860 et 1870. Suite à l’immigration massive des juifs yéménites en Israël au XXe siècle, seuls quelques milliers de fidèles restent au Yémen, se fondant dans la majorité musulmane ou émigrant à leur tour.

    Illustration  : La mort du roi
    Cette miniature ottomane du xvie siècle reprend la tradition musulmane selon laquelle le roi Abraha serait mort lors d’une expédition militaire à La Mecque, menée avec quelques éléphants. La Kaaba, qui représentait une concurrence pour le pèlerinage de Sanaa, aurait alors été miraculeusement sauvée de la destruction.

     

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